Lovution

fiction amère

Des histoires d’amour il en pleuvait, et ça transperçait ma capuche.
Sous la pluie d’une balade nocturne, je me remémore les poncifs.

Une belle, déjà.
Comme ils le disent tous avec plus ou moins de mauvaise foi, c’est toujours avec une belle que les histoires commencent. Parce que lorsqu’il y a une belle, les hommes deviennent un peu des hommes et tout ce que ça implique ; de bon, comme de mauvais. Mais pas n’importe quelle jolie mignonne qui aurait atteint cet objectif morphologique par hasard, non. La nature l’a bien faite, la belle, et tout autant il lui faut souffrir pour l’être ! Ceci dit, elle aime ça, la belle, l’être. Pour les hommes un petit peu, déjà parce qu’ils ne le sont pas, belles, et ensuite pour elle-même, parce que être belle ça valorise un ego qui n’aurait pas à gémir de lui-même ou d’un autre.

J’arpente les rues sous la fuite du ciel.
A cette heure-ci, pas vraiment un chat.
Je voudrais que mon insomnie ne soit pas inutile.
Alors, je continue.

Un bel, ensuite.
Mais moins beau que fort, agile et doux ou ferme. Parce que les belles ont le monopole du beau, cette donnée de distinction par le paraître. De fait, le bel doit compenser par autre chose s’il veut se faire valoir. Une insolence courageuse pour affronter les dangers, protéger et choyer la belle, par exemple. Ou bien la capacité d’intriguer par des belles paroles que la belle écouterait, hypnotisée et indifféremment avide, dans tout ce que ça implique ; de bon, comme de mauvais. Des belles paroles, oui, qui poursuivent à chaque fois la même chose dans les histoires d’amour : conquérir le cœur de pierre de la belle.

Les mains dans les poches, je sèche mes mains.
Dans ces lieux les ombres des lampadaires.
Je marche parce que je ne veux pas me ratatiner.
De l’espace, dehors.

Et après ?
La belle est unique, noble, exceptionnelle. Personne ne la vaut, personne ne la remplace, personne ne la dépasse, en beauté, en unicité, en noblesse. Elle attend, elle espère, elle désespère, elle rit ou elle pleure, mais ce qu’elle n’avouera jamais de prime abord à n’importe quel bel, c’est qu’elle en attend un, presque trop patiemment d’ailleurs. Le bel, lui, est juste celui qu’il veut être et il s’en fout du reste, un peu trop d’ailleurs, également. Il sait que c’est son rôle de bel, à lui, que d’aller tailler le marbre des émotions de celle qui joue l’attirance avec lui. Alors il se lance, et le but des histoires d’amour, c’est de montrer que c’est pas si compliqué pour lui de l’émerveiller elle par son action, autant qu’il est émerveillé lui par son être à elle.

Mince, c’est presque si ma solitude ne me manque pas.
Elle est là, et je ne sais pas quoi en faire.
Je passe le temps, et il me tue.
Personne.

Ce qu’il se passe alors ?
Eh bien l’amour rencontre un frein. Le bel est pauvre… le bel est en prison… le bel, oui, le plus souvent lui, est imparfait pour la belle, et quoi qu’en soit l’effet réciproque, c’est à lui de combler ses propres failles, par une abnégation de son essence et une affirmation de son devenir. Heureusement, la belle accepte parfois les excuses ; parfois elle accepte de ne pas trop s’offusquer ; en bref, elle est tolérante, bienveillante, généreuse. Et elle va guider celui qui l’a choisie pour qu’elle le choisisse.

Quelques fenêtres allumées, si peu.
Et pourtant, des activités douillettes transpirent.
J’observe, j’imagine.
Ce vide.

Et puis, on ne sait pas trop ce qu’il se passe, mais à la toute fin…
Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants.

Dot Quote

Publié par Rémy Revel

total, généreux, gratuit

Laisser un commentaire